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Question parlementaire n°7963 : https://www.chd.lu/fr/question/25622

  1. La première question posée était si les Ministres estimaient qu’une garantie d’achèvement émise par une assurance offrait le même degré de protection aux acquéreurs qu’une garantie émise par une banque.

À très juste titre, les Ministres ont répondu que le degré de protection offert dépend avant tout du contenu et des modalités intrinsèques à la garantie émise, et non essentiellement de la qualité du garant.

En effet, à degré de solvabilité équivalent entre le garant banque et le garant assurance, il faut rechercher dans le texte même des dites garanties et les conditions y fixées, laquelle est de facto la plus protectrice.

Dans ce contexte, une garantie émise par une compagnie d’assurance peut même être plus protectrice que celle émise par une banque si ses conditions sont plus favorables aux bénéficiaires. L’inverse peut être vrai aussi, et il faut rappeler que les garanties émises par les banques peuvent également prévoir des conditions différentes. Seule une comparaison au cas par cas permet in fine de déterminer quelle est parmi les garanties sur le marché, la plus protectrice.

Si l’état actuel de la législation, quoique lapidaire sur ce point, prévoit que les garanties émises doivent respecter certaines conditions, rien n’empêche le promoteur de rechercher des garanties plus protectrices que ce qui est légalement prévu.

Pour rappel, que la garantie d’achèvement soit émise par une banque ou par une assurance, le contrat sur base duquel l’émission se fait est en principe conclu uniquement entre le promoteur et le garant, les acquéreurs n’étant pas partie aux dits contrats, mais uniquement tiers bénéficiaires des garanties in fine émises.

Il est donc dans ce contexte primordial que les promoteurs soient attentifs aux conditions des garanties qu’ils entendent donner à leurs acquéreurs et qu’ils souscrivent les contrats adaptés.

De même, les acquéreurs devraient se renseigner en amont d’une acquisition sur les modalités et contenu de la garantie qu’il est envisagé de leur remettre.

Finalement, l’obligation de conseil du notaire instrumentaire fera que ce dernier devra également s’intéresser aux termes et conditions de la garantie offerte.

  1. La deuxième question consistait à interroger les Ministres sur l’émission de garanties d’achèvement par des compagnies d’assurance est conforme à l’objectif du projet de loi n°1967 relatif aux ventes d’immeubles à construire et à l’obligation de garantie en raison des vices de construction.

L’objectif visé par ce projet de loi n’était autre que la protection des acquéreurs achetant des immeubles à construire.

La réponse des Ministres est à nouveau celle qui s’imposait, à savoir que tant que la garantie d’achèvement émise par une assurance répond aux conditions des articles 2 à 5 du règlement grand-ducal de 1977, il faut considérer que la protection des acquéreurs visée par la loi est assurée.

Il serait à notre sens bien plus légitime de s’interroger a contrario sur la conformité à la Constitution de l’article 1er du prédit règlement qui sans justification réserve dans le texte l’émission de garanties d’achèvement aux établissement bancaires et d’épargne.

Tant la version de la Constitution encore en vigueur à ce jour que la version révisée qui entrera en vigueur au 1er juillet 2023 garantissent la liberté de commerce et d’industrie, à laquelle seule la loi peut déroger si les limites posées sont rationnellement justifiées, adéquates et proportionnées à leur but.

L’article 1er du prédit règlement semble en contradiction manifeste avec cela.

  1. En troisième et dernier lieu les Ministres étaient interrogés sur leur intention ou non de faire barrage au niveau législatif à la possibilité de transformer une garantie d’achèvement en garantie de remboursement.

À cet égard, il faut insister tout d’abord que pareille transformation qui est prévue par le Code civil et le règlement grand-ducal de 1977 n’est aucunement réservée aux compagnies d’assurance, mais qu’il s’agit d’une faculté dont bénéficient bien évidemment également les banques, seules citées d’ailleurs dans le règlement.

Cela étant précisé, les Ministres ne se sont pas prononcés sur le fond de la question ; ils se sont limités à faire savoir qu’ils allaient analyser cette question de concert avec les différents acteurs impliqués, et que la législation serait ajustée « au besoin ».

En tout état de cause, la transformation reste possible en l’état actuel, et il est difficilement concevable de l’exclure totalement, alors que dans de diverses situations exposées dans le contexte d’un précédent article, un achèvement se révèle en pratique tout simplement impossible ou déraisonnable.

 

Il reste à espérer que l’analyse à venir dépassera le cadre de cette seule question et permettra de mettre en lumière les difficultés découlant de la législation actuellement en vigueur.


Par Maître Vanessa LOMORO, Counsel – Avocat à la Cour, DSM Avocats à la Cour.